Torgny, le village le plus méridional de la Belgique avec ses 230 habitants, le village le plus inaccessible en transport public parait-il. Là-bas vit l’un des plus anciens, fervents supporters, encore administrateur de l’ACD qui vient d’être auréolé du titre du Mérite sportif 2024 de la commune de Rouvroy.
Depuis un jour de l’automne 1957, Pierre Joannès vit, respire, transpire « ACD ». Avec Claude Damoiseaux, son frère Jean, ils étaient les meneurs de troupe.
Fils de la cheville ouvrière et fondateur du club, André Joannès, Pierre a connu une carrière sportive complète et s’est rapidement imposé comme entraineur d’abord à Torgny, ensuite à Solumont puis sur la piste de Saint-Mard. Etant au départ plus spécialisé dans les épreuves de lancers, il a eu l’envie de suivre une formation d’entraineur de ½ fond. Il a ainsi participé à la poursuite de l’épanouissement du club, entrainant dans son sillage plusieurs générations de jeunes athlètes qu’il a conduit à des niveaux nationaux et internationaux.
Pierre n’a pas toujours sa langue dans sa poche
Pierre, dit le Bock, est aussi le fidèle qui sans relâche, a organisé, coordonné plusieurs années l’équipe des intercercles de l’ACD. Mais attention, il ne garde pas toujours sa langue en poche. Quand en 2015, lors d’intercercles de D1 nationale disputés au SMAC, une plainte avait été déposée contre lui auprès de la LBFA pour des propos qualifiés de peu corrects et qui avaient été rapportés dans un article de l’Avenir, « Une journée de m…, organisée par des gens qui n’y connaissent rien » avait osé affirmer l’entraineur de Dampicourt, les yeux dans les yeux des responsables. Des mots pensés tout bas par les représentants des autres clubs présents mais que seul le « Bock » avait exprimé haut et fort lors d’une organisation qui avait été particulièrement en effet très chaotique. Le Bock avait écopé de trois mois de suspension…
Ses avis sont souvent tranchés. Par exemple, le foot actuel, il n’aime pas, il déteste même. S’il a été joueur en cadets à Ethe, aujourd’hui, la vue d’un ballon peut lui déclencher de l’urticaire à cause d’une mentalité qui s’est détériorée. Calmement, il narre : « On fume avant, quelques fois durant la mi-temps et certainement encore après le match. Un monde pourri par l’argent, un sport pratiqué trop souvent à l’échelon seniors, quelques fois déjà avant, par des mercenaires où les valeurs d’un club sont piétinées par la couleur de quelques billets de banques. Si un autre club propose plus, on quitte l’ancien sans émois. » Gaumais, les résultats de l’Excelsior de Virton ne lui font ni chaud ni froid.
Un brin de nostalgie…
Son meilleur souvenir, le titre de champion de Belgique féminin glané à Leuven : « C’est mon meilleur souvenir. Que d’émotions et la délivrance à la fin de la journée. Tout Dampicourt pleurait dans les tribunes et on se congratulait sans cesse. Un souvenir gravé à jamais. »
Très tôt, si le Bock a inculqué plutôt les techniques de lancer, il a endossé le titre d’entraineur faute de candidat. Les athlètes qui l’ont marqué le plus, Valère Hustin qu’il est allé dénicher lui-même dans le club de foot de Meix-devant-Virton et Jean-Pïerre Weerts. Et il argue :
« La plus grande qualité chez un athlète c’est la régularité. Si un athlète est moins doué mais s’il est régulier, il deviendra meilleur que le doué…s’il celui-là est moins régulier. »
Enfin, il a révélé son épouse Edith Graff à la piste en lui demandant un jour de boucher un « trou » dans l’équipe des intercercles. Edith avait alors 25 ans et venait de faire son premier sprint en terminant à bout de souffle et a peut-être pensé en franchissant la ligne que l’on y reprendra plus . Avec Pierre qui lui a mis les pieds à l’étrier, elle allait devenir une athlète de haut niveau et Edith l’a rejoint ensuite comme entraineur de sprint avec comme élève Julien Watrin.
Pourquoi Bock ?
Ne demandez pas à Pierre pourquoi on l’appelle Bock… il n’en sait rien lui-même. « Même les enfants que j’entrainais m’appelait Bock, tous convaincus que c’était mon prénom. Mais j’aime ce sobriquet…c’est mieux que Pierre. Je préfère que l’on m’appelle Bock plutôt que Pierre et encore moins Monsieur Joannès. »
Enfin, sachez, vous, les athlètes de l’ACD, que le Bock, même s’il n’est pas présent sur les pistes, épie chacun de vos résultats. Il est capable de citer les records de chacun des athlètes de l’ACD. « J’ai toujours eu une excellente mémoire des chiffres… »